Il y a à peu près un an, André, Marie et Louis ont entrepris
le projet ambitieux de récolter les fonds nécessaires à la construction de kay (maisonnettes) pour quelques
familles pauvrissimes comprenant un ou plusieurs de nos parrainés. L’idée était
de dresser une liste de priorités (procédé déchirant, un peu comme établir une
liste de dons d’organe), et de voir jusqu’où la générosité des donateurs nous
porterait. Vous verrez qu’elle nous a portés loin.
Il fallait aussi
créer des plans et devis et confier les chantiers à des gens de confiance, ce
qui fut fait. (Antonio a le don de s’entourer de gens fiables; lui, dirait que
c’est le fruit de l’expérience). À cette heure, les familles Badio et Samedi
ont déjà leur maison, et en sont très reconnaissants. La construction de la kay Joseph devrait débuter aussitôt que
la route menant au terrain sera praticable (l’ouragan Sandy a fait beaucoup de dégâts),
la kay Magnel lorsque le choix du
terrain sera confirmé. Quant à celle des Laguerre, elle sera terminée d’ici
trois semaines. André et Marie participent déjà aux « fouilles », c’est-à-dire au travail de
fondation. Le terme est
approprié : André me raconte qu’il a trouvé des objets enfouis jusqu'à
trois pieds sous terre – culotte, canif, jouet, déchets. Les villes s’enfoncent
au fil des siècles, vous diront les archéologues. Nul besoin d’attendre si
longtemps dans un pays ou la terre est friable et les glissements de terrains
fréquents.
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Kay Samedi |
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Famille Samedi (avec André, Antonio, Marie et Fritz à droite) |
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Famille Badio (avec Antonio) |
Marie et André seront mieux placés que moi pour relater
l’évolution du chantier, mais en voici quelques impressions, fraiches de la
veille.
Le 11 janvier, nous nous sommes réveillés avec le soleil. La
température est agréable avec le vent. Après un copieux déjeuner de fruits
frais et de toasts au beurre d’arachide, nous partons à l’encontre de Fritz, notre
contremaitre, qui nous conduit jusqu’au terrain de la famille Laguerre. Il faut
pour ce faire emprunter le chemin qui mène anwo,
vers l’École Papatanm et les montagnes. Juché sur une petite corniche cerclée
d’arbres à puce (ce n’est pas leur nom, mais ils causent des démangeaisons au
contact), le petit lopin de terre a une vue imprenable sur la ravine et la mer.
Nous avons confiance en Fritz et en son assistant Habilhomme Tipapa qui croient
le projet réalisable dans les temps.
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Terrain des Laguerre |
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Famille Laguerre
(Jean Claudy, Maudeline, Clyvens, Maude,
Jean-Claude, Dickens et Stefanie) |
Maigichon au grand sourire, Jean-Claude Laguerre, qui porte
très mal son patronyme, nous accueille chaleureusement avec son épouse Maude et
ses enfants Stefanie, Clyvens, Maudeline, Jean-Claudy et le petit Dickens. Jean-Claude
aura cinquante ans cette année, la maison sera son cadeau de fête. Homme simple
et travaillant, il fait partie de la main d’œuvre qui s’affaire à
l’aplanissement du terrain, à la montée des matériaux et de l’eau sur le chemin
escarpé. Son gagne-pain principal : boss balais: il les tresse en
utilisant ses orteils, ce qui lui vaut des pieds croches. C’est une déformation
professionnelle, qui ne lui rapporte presque rien. Maude vend du charbon de
bois, pas de quoi arrondir la fin du mois, ni celle de la semaine en fait.
*
Après la visite chez les Laguerre, nous divisons l’équipe.
Antonio et moi partons faire la tournée des classes à l’École Maranatha.
Chansons à répondre et rires au menu, en plus d’une assiette bien remplie pour
les élèves. Les enfants n’ont pas l’habitude d’être divertis par leurs
enseignants. Après quelques hésitations, la glace est brisée (la couche n’est
pas épaisse, même en hiver). Ils s’esclaffent à la moindre de nos pitreries. Satisfait
de notre numéro, nous allons passer une heure à la plage en fin d’après-midi. Tandis
que nous décompressons dans l’eau salée, André et Marie reviennent du chantier,
épuisés mais radieux. Le travail va bon train, l’équipe est harmonieuse. Nous
nous racontons notre journée autour d’un bon repas de riz et de boulettes de pain
de viande.
*
Aujourd’hui, samedi le 12 janvier, est une journée de
préparatifs. Demain, nous partons en expédition jusqu’au hameau de Laporte, à
trois heures d’ici en montagne. Nous y resterons jusqu'à mercredi midi, logeant
dans les chambres du presbytère récemment reconstruit par l’Équipe. La finition
de l’école St-Joseph est presque terminée. Antonio y va pour constater, mais
aussi dans l’optique de futurs projets de construction. Nous apportons
également quatre bacs de livres et de jouets qui serviront dans les classes et
pour le préscolaire. Mon objectif personnel sera d’animer le plus grand nombre
d’enfants possible durant le séjour. Marie se chargera de bricolages, alors qu’André
et Antonio apporteront du support pédagogique dans les classes.
Pas d’électricité à Laporte, donc pas d’ordinateur et pas
d’internet. Je vous redonne des nouvelles mercredi, promis!
J.O.R.
PS : J’ai ajouté des photos pour illustrer les textes précédents;
j’en ajouterai d’autres de temps en temps, mais comme la connexion Internet est
lente, j’accuserai souvent du retard. Feuilletez à rebours de temps à autres,
ça vaut la peine.
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