jeudi 10 janvier 2013
Jour 1 et 2 : Un départ à la cocorico!
Si je devais peindre Port-au-Prince, j’aurais besoin une
très grande toile. J’y appliquerais une couche de fond noire – noire, pas pour
la peau, pas pour la misère, mais pour les contrastes, pour accentuer les
couleurs. Et quelles couleurs! Depuis le siège de passager avant de notre taxi,
la ville m’apparaît belle dans son capharnaüm. Avec le coucher du soleil, elle
apparait comme un gigantesque bouquet de briques, de ferrailles, de déchets, de volailles, de mangues, de camions peints,
de foulards, d’odeurs, de bruits, de vie.
Nuit
sans moustiques et peu de ronflements. Les coqs chantent sans arrêt,
évidemment, un peu comme des enfants dans une balade en voiture. L’ennemi
numéro un de l’humanitaire, c’est sans contredit le réveille-matin à crête.
Félix
vient nous retrouver à l’école tôt le matin. Antonio est déjà debout, en train
d’écrire. C’est l’heure du branle-bas de combat, on déménage en tap-tap. Le
temps que Marie s’étire et qu’André se décrasse les yeux. Antonio, Félix et le
gardien ont déjà attaché les vélos sur le toit du véhicule et transféré la
moitié des valises. En quinze minutes, nous sommes en route.
J-O : On n’a pas assez d’yeux pour tout voir!
Antonio : Ben, arrête de me regarder, regarde la
route!
Je
me retourne en riant, pas tant parce qu’Antonio fait son comique (faut pas trop
l’encourager) que parce que je suis heureux de retrouver Haïti. Port-au-Prince
s’est transformé depuis 2010, et en bien; d’après les autres compagnons, le
changement est même frappant depuis l’an passé. Les médias diront bien ce
qu’ils voudront, les dons gouvernementaux et les investissements étrangers
portent fruits. Salomon, notre chauffeur, se taille un chemin à coup de
parechoc dans les rues bondées, mais la route principale est neuve et droite.
Il y a des poules partout sur l’asphalte, mais pas de nids.
Notre
voyage se déroule sans encombre depuis le départ. Le personnel de l’aéroport de
Montréal s’est montré d’une grande courtoisie malgré les complications que
représentaient nos vélos (trop gros pour le scanneur) et la vieille lampe à
l’huile de ma mère (cadeau pour l’école
Saint-Joseph). Avis à tous : S’il vous prend l’envie de vous éclairer à
l’huile en voyage, assurez-vous qu’elle ne sente pas. Heureusement pour nous,
le dernier usage datait de la crise du verglas...
Après
un vol sans turbulence, nous avons découvert un aéroport rénové, propre, et
efficace: une plaisante surprise. Plutôt que de nous battre pour trouver nos
valises dans une pile, nous nous entassons contre le tourniquet à bagages et récupérons tous les
morceaux. La guitare d’André est saine et sauve. Nous aurons droit à un petit
spectacle le soir même.
Voyager
en Haïti comporte toujours des imprévus, on ne sait jamais à quoi s’attendre.
Nous n’arrêtons pas à l’épicerie finalement, parce que Salomon oublie notre requête
et passe tout droit. Tant pis, on se contentera de nos réserves, de pain tranché
acheté à la station-service et d’une bouteille de vin (un must en cas d’imprévu!). Parce que la route est barrée pour la nuit
au-devant de Grand Goâve, nous devons aussi nous improviser un campement. Nous
contactons sœur Véronique Rose, directrice de l’école Notre-Dame-Marie, qui
demande au gardien de nous ouvrir le portail, où nous trouvons une classe vide
pour établir notre campement. À l’exception de la douche, que nous reportons au
lendemain, on s’y retrouve au chaud, à la lumière, dans un quasi confort. Avant
d’aller dormir, on soupe (sandwichs de saumon en canne et beurre d’arachide,
fromage, vin rouge, une mangue), on se rafraîchit sous la voie lactée, Vénus,
et les autres, André chante Plume Latraverse, les chiens de Petit-Paradis font bark vocals.
Programme
chargé en ce 10 janvier. Après l’installation au bivouac chez Félix, rencontre
avec le directeur et les professeurs de l’École Maranatha à 10h, tour des
classes à l’École Saint-François à 11h, réunion avec le contremaître Fritz
concernant les travaux effectués à l’école Saint-Joseph 14h, visites des deux
maisonnettes Badio et Samedi bâties cet hiver et planification des deux
prochaines constructions. La journée passe vite, le soleil est déjà couché
depuis longtemps à l’heure où j’écris ces lignes.
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